Winston Churchill: Discours à la jeunesse universitaire

1975 – L’école et les réformes éducatives en RFA et en RDA

Le développement socio-économique des deux États allemands dans les années 1950 et 1960 a marqué l’enseignement scolaire. En RFA, les tensions entre le processus de modernisation de l’économie et de la société et l’immobilisme de la politique éducative se dessinent de plus en plus nettement. La demande croissante en main-d’œuvre qualifiée découlant de l’essor économique, ainsi que l’accroissement démographique, débouchent sur le renforcement et sur l’expansion de l’éducation. Le pourcentage d’élèves fréquentant les écoles du secondaire augmente, sans toutefois que la perméabilité sociale du système éducatif ne change vraiment. Le renouvellement générationnel des années 1960 et les efforts de démocratisation de la société d’après-guerre contribuent également à la mise en œuvre de vastes réformes de l’éducation.
Sous le mot d’ordre de la « catastrophe de l’éducation » (Georg Picht, 1964), le retard de modernisation du système éducatif ouest-allemand fait l’objet de critiques au milieu des années 1960. Le Conseil allemand de l’éducation créé en 1965, qui rassemble des représentants des ministères de l’Éducation, des groupes sociaux et de la communauté scientifique, est chargé par la Fédération et les Länder d’élaborer des recommandations en vue d’une réforme de l’enseignement. Son plan de restructuration de l’enseignement scolaire, soumis en 1970, prévoit la réorganisation de l’éducation selon des normes internationales. Au lieu du système éducatif vertical, ce Conseil propose une structure horizontale divisée en un cycle primaire (1e à 4e classe), un premier cycle du secondaire (5e à 10e classe) et un second cycle du secondaire (10e à 13e classe), dans le cadre d’une forme d’école intégrative, la Gesamtschule. Les lignes directrices du plan de restructuration sont intégrées en 1973 dans le plan général élaboré par la Commission État-Länder pour la planification de l’éducation (BLK) créée en 1970. Ces deux plans visent le développement qualitatif et quantitatif du système éducatif. L’égalité des chances et l’encouragement des aptitudes individuelles doivent être assurés par une école extérieurement intégrée, mais intérieurement différenciée en fonction des performances et des dons, et orientée sur les acquis de la science dans ses contenus d’enseignement. Comme le Conseil allemand de l’éducation et la Commission État-Länder ne peuvent qu’émettre des recommandations, et que les résistances émanant des milieux conservateurs de la politique, de la société et de l’éducation envers des réformes plus poussées se renforcent nettement au début des années 1970, ces plans ne seront que partiellement réalisés. Un cycle d’orientation mis en place dans la 5e et la 6e classe repousse de deux ans l’orientation des élèves dans le secondaire. Il doit permettre une meilleure évaluation des capacités de chaque élève. Le second cycle des Gymnasien est réformé, et offre un système différencié de cours permettant aux élèves de choisir certaines matières en option, avec des formes de travail qui s’apparentent à celle des études universitaires. Après dix ans d’essais, la Gesamtschule n’est introduite que dans les Länder gouvernés par les sociaux-démocrates, comme quatrième type d’école, à côté de la Hauptschule, de la Realschule et du Gymnasium. De plus, l’installation d’une Gesamtschule dépend de la décision des parents. Même ces réformes partielles feront par la suite l’objet de controverses, d’autant que leur réalisation s’accompagne de certains déficits. On peut donc considérer la grande réforme de l’éducation ambitionnée au milieu des années 1960 comme un échec, à la différence d’autres pays européens. Malgré une nette augmentation de l’effectif des élèves dans les années 1970 et 1980, l’un des objectifs majeurs n’est toujours pas atteint : les chances d’accès à l’éducation restent encore très inégalement réparties entre les couches sociales. Par contre, les différences entre garçons et filles se sont effacées.
En RDA, les structures créées à la fin des années 1950 restent en place jusqu’à la Loi sur le système éducatif socialiste unique du 25.2.1965, et au-delà, jusqu’à la fin du régime est-allemand. Cette loi règle pour la première fois tous les aspects du système éducatif. Elle souligne la mission éducative idéologico-politique de l’école et formule comme objectif éducatif le développement de la personnalité socialiste. Le Wehrunterricht (« enseignement militaire ») introduit en 1978 sert en particulier à la formation de citoyens socialistes loyaux, dotés d’une conscience de classe. Il montre combien la militarisation marque la pratique éducative en RDA, parallèlement à l’idéologisation. Cette pratique émane d’une instance centrale, le ministère de l’Éducation populaire, qui élabore les programmes d’enseignement et supervise les manuels scolaires. Reposant sur les travaux de l’Académie des sciences pédagogiques, un institut d’État tenu de respecter les impératifs politiques, les fondements théoriques de la pédagogie socialiste doivent être appliqués dans les pratiques d’enseignement. L’enseignement est basé sur un programme obligatoire pour toutes les écoles, sur un horaire scolaire unique et un manuel imposé pour chaque matière et accompagné de directives didactiques. Ce concept socio-pédagogique fermé est porté par l’idée que des classes d’âges entières pourront ainsi en même temps recevoir une éducation socialiste commune, et que les relations intergénérationnelles et la formation d’une société socialiste unique en seront renforcées. La direction centrale du système éducatif exercée par le ministère jusque dans les écoles, et l’obligation pour les instances inférieures de remettre des rapports au ministère contribuent à la mise en œuvre de ces objectifs politico-idéologiques.
Du point de vue institutionnel, on ne constate aucun grand changement. Le passage à la Erweiterte Oberschule s’effectue à partir de 1982 après la 10e classe, de sorte que l’EOS est réduite à deux années scolaires. Les élèves désireux d’intégrer l’EOS doivent avoir appris le russe et une deuxième langue étrangère. Environ trois à dix pour cent d’une classe d’âge obtiennent l’accès à l’EOS. A côté des performances, les critères déjà évoqués entrent toujours en ligne de compte, mais ont à nouveau un effet de verrou social, après le changement d’élite des années 1950 favorisé par le système éducatif, ainsi que les changements intervenus dans la politique de l’éducation dans les années 1970 et 1980.
Du point de vue des contenus, l’enseignement à la POS est toujours centré sur le domaine des mathématiques, des sciences naturelles et des techniques, afin de répondre aux demandes de l’économie. En 1988, ce domaine représente 29 % de l’ensemble de l’enseignement dispensé, pour 22,9 % d’allemand et de littérature et 11 % d’enseignement polytechnique. L’école et le monde du travail sont reliés par la mise en place d’une « journée d’enseignement dans la production » et l’enseignement de matières axées sur la formation professionnelle, comme le dessin technique.
L’éducation et l’apprentissage jouent un rôle majeur dans la société est-allemande et sont considérés comme les garants de la formation d’une société socialiste. Sous le contrôle de l’État et du parti socialiste unique, les structures mises en place dès l’occupation soviétique sont encore développées et optimisées.

Susanne Grindel
Traduction: Isabelle Quillévéré-Eberle
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